" Les villages isolés mourront lentement
dans l'indifférence générale "

L'Association des maires ruraux de l'Aveyron réagit face à la loi NOTRe

Impôts, très haut débit, suppression des classes uniques, transfert de l'eau et de l'assainissement, de l'urbanisme et de la voirie... Les conséquences que pourront entraîner les futurs fonctionnements des communes nouvelles et des communautés de communes inquiètent les membres de l'Association des maires ruraux, tant au niveau national qu'aveyronnais.

" L'Association des maires de France a inventé le concept de communes nouvelles et l'a fait passer au gouvernement. Nous ne sommes ni pour ni contre, mais nous n'avions pas inscrit cette possibilité dans nos programmes électoraux. Nous considérons qu'il s'agit d'une décision qui doit être prise par les habitants et non par les élus qui ne l'avaient pas envisagée en 2014 ", indiquent les membres du bureau de l'Association départementale des maires ruraux, présidée par Patrick Guénot, maire de Versols-et-Lapeyre. " Les communes doivent communiquer. Par honnêteté par rapport aux habitants, il faudrait faire un référendum local, en indiquant les avantages et les inconvénients. Pour nous, représentants des maires ruraux des communes de moins de 3.500 habitants, nous devons garder la proximité des habitants pour répondre à leurs attentes dans le respect de notre mandat. Cette vision, aujourd'hui, n'est pas partagée par l'Assemblée des communes de France (ACF) et l'Association des maires de France (AMF) ".


Changements à venir

L'application de la loi NOTRe entraînera plusieurs changements pour les communes rurales.

La Dotation globale de fonctionnement (DGF) :

" Le maintien de la DGF est une carotte gouvernementale méprisable car elle se fait au détriment des autres communes. C'est appauvrir les communes qui ne vont pas faire les communes nouvelles. Nous nous insurgeons contre la politique nationale qui nous pousse vers ces communes nouvelles par le maintien de la DGF. C'est une catastrophe pour le monde rural et la démocratie. Ils vont nous faire mourir de soif en fermant les robinets. En plus, la DGF n'est pas identique entre les urbains et ruraux. 130 euros sont prévus par habitant sur les communes urbaines et 65 euros par habitant pour les petites communes. Ils ne raisonnent pas en aménagement du territoire. "

Elections :

" Le nombre d'élus sera divisé. Les élections se feront par liste, comme pour les communes de plus de 1.000 habitants. Donc ce seront des élus politiques. La vie rurale sera politisée. Au sein de l'Association des maires ruraux de France, nous ne votons pas pareil nationalement, mais nous avons le même avis sur la vision de la ruralité. Quand nous nous présentons aux municipales, nous ne connaissons pas les tendances des conseillers municipaux, l'essentiel pour nous, ce sont les projets. "

Impôts : " A terme, dans 12 ans, tous les impôts seront tirés vers le haut, vers le montant de la commune qui paye le plus. Les petites communes auront le même impôt que cette dernière. Les contribuables, par leurs impôts, financeront des investissements dans la commune centre qu'ils n'utiliseront jamais. Ils payeront plus pour moins de services. "

" On dicte aux maires ce qu'ils doivent faire "

Au niveau des communautés de communes, jusqu' à présent le fonctionnement repose sur " la volonté des élus de partager des compétences décidées ensemble. Le principe était de mettre ensemble ce que nous ne pouvions pas organiser seul, ce n'était pas imposé. Aujourd'hui, ils voudraient que toutes les compétences soient transférées dans les communautés de communes. La conception de l'ACF et l'AMF est à terme de remplacer les communes, quelle que soit la situation des communautés de communes, qui sont différentes sur nos territoires. Ce sont aux maires de décider. Ce que l'on reproche, c'est qu'aujourd'hui, on nous impose, on dicte aux maires ce qu'ils doivent faire. C'est l'Etat qui va trouver des solutions avec l'AMF. Les maires sont quand même capables d'aller de l'avant ! " Les membres de l'AMR ont relevé différents points réalisés " au détriment des petites communes isolées ".

Le très haut débit :

" Les ruraux ne sont pas traités comme les urbains. Nous, nous devons payer 10 % pour l'installation du très haut débit, ce qui représente 30 € de plus par famille. Toutes les communes rurales ne l'auront pas. C'est une injustice forte entre l'urbain et le rural, et, au niveau rural, entre les bourgs centres et les villages éloignés. "

Ecoles :

" Toutes les écoles doivent fonctionner avec l'accès numérique. Dans le même temps, on nous explique qu'il ne faut plus d'école à classe unique, ce qui impose de concentrer les écoles sur la même commune, qu'il ne faut plus accueillir d'enfants de moins de 3 ans sans projet éducatif territorial et l'Etat se désengage de ces projets. "

Eau et assainissement :

"L'Etat va imposer d'ici 2018- 2020 de transférer l'eau et l'assainissement aux communautés de communes, sans trop savoir comment cela va être géré, sans savoir les incidences sur le prix. Le prix sera identique pour tous, alors qu'en général, les bourgs centres payent plus cher. "

L'urbanisme :

" C est un transfert de compétence sournois. Les communes rurales ne sont pas aidées, alors qu'à l'intercommunal nous recevrons des aides.
Indirectement l'Etat nous pousse vers l'intercommunal. Jusqu'à présent la DDT instruisait les permis de construire pour le compte des communes. En 2017, l'Etat se désengage, les communes vont être obligées de payer quelqu'un pour faire les permis de construire. Ce qui représente 100 à 150 € par permis de construire. Pour une commune de 500 habitants, ce sont 10 à 15 permis de construire réalisés par an. En se désengageant, c'est une charge en plus que l'Etat transfère. "

Fin de la proximité

" Notre association départementale et nationale se bat contre cette technocratie. Nous invitons tous les maires des communes rurales à nous rejoindre. Nous allons interpeller les élus, les députés, les sénateurs et les candidats à la présidentielle. Si nous n'y arrivons pas, il n'y aura plus de proximité, les villages isolés seront désertés et mourront lentement dans l'indifférence générale. Il faut trouver un équilibre indispensable. Nous comprenons qu'il y ait des centres urbains, mais nous voulons qu'on nous laisse notre place. "

Courtoisie : Mélanie ANDRIEU / Le Progrès Saint-Affricain 31 mars 2016


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