La recherche et la pollution minière




Médailles de l'innovation CNRS 2014

L'ANR se réjouit de voir Claude Grison récompensée

Spécialiste de la chimie " éco inspirée ", Claude Grison recevra le 18 juin prochain la médaille CNRS de l'innovation 2014 pour ses travaux sur la dépollution des sols miniers grâce à l'utilisation des plantes. En 2011, elle a été soutenue par l'ANR pour un projet portant sur la valorisation chimique et le recyclage vert des déchets miniers. L'agence se réjouit de voir ses travaux récompensés.


Claude Grison vient de démontrer que certaines plantes capables de décontaminer un sol pollué peuvent être recyclées et devenir de précieux ingrédients pour la science. Rencontre avec une chimiste " éco-inspirée ".


" C'est un cercle vertueux : la chimie peut devenir moins polluante grâce à l'écologie, et la chimie offre des débouchés économiques à l'écologie. "


Chimiste de formation, Claude Grison s'est intéressée un peu par hasard à l'écologie, quand des étudiants de l'université Montpellier 2, où elle enseigne, sont venus la consulter sur une problématique inédite : pourrait-on réparer les dégâts causés par l'homme sur des sites miniers grâce aux plantes ? " En me penchant sur cette question, j'ai découvert que certaines espèces végétales sont capables de supporter la pollution, par exemple sur des sites miniers. Non seulement elles résistent à la toxicité du sol, mais elles sont capables d'en extraire les éléments métalliques et de les stocker dans leurs feuilles. C'est ce qu'on appelle la phytoextraction, un phénomène 100 % naturel ", nous explique-t-elle.
Convaincue que ces plantes " métallivores " peuvent jouer un rôle clé dans la décontamination des sols pollués, Claude Grison persévère, motivée par un double constat. " À l'heure actuelle, il n'existe aucune solution écologique pour dépolluer des sites contaminés par les opérations minières. Par ailleurs, les ressources métalliques sont limitées et finiront un jour par s'épuiser. Or, elles sont indispensables à l'industrie chimique qui s'en sert comme catalyseurs, pour synthétiser des médicaments par exemple. ". La scientifique pressent qu'un cercle vertueux peut se mettre en place et elle décide de prouver que la phytoextraction a une valeur économique en plus de son potentiel écologique.
C'est à Saint-Laurent-Le-Minier, dans le Gard, et en Nouvelle-Calédonie qu'elle mène ses premières expériences. Un travail de longue haleine, car il faut observer le terrain pour identifier les plantes adéquates avant de réintroduire de la végétation. " Chaque site est différent et il faut respecter à 100 % la biodiversité locale. La dépollution est un phénomène lent, qui peut durer 50 ans sur certains sites. Heureusement, notre action a aussi un impact à court terme : en réintroduisant de la végétation, on peut limiter l'érosion du sol et éviter que le vent ou la pluie n'éparpillent des éléments métalliques autour du site, avec des conséquences sanitaires et environnementales très préoccupantes. ".
Il aura fallu une année entière à Claude Grison pour relever son défi : produire des catalyseurs chimiques à partir de feuilles contaminées issues de sites miniers. Un premier succès couronné par un brevet du CNRS. Aujourd'hui, elle en compte douze à son actif. " Les résultats sont allés au-delà de nos espoirs, se réjouit-elle. Les catalyseurs obtenus grâce à la phytoextraction sont meilleurs que les catalyseurs traditionnels, car ils sont plus actifs. Et ils sont recyclables, ce qui permet de développer des procédés chimiques éco-responsables, sans impact négatif sur l'environnement. ". Autrement dit, une petite révolution verte dans le monde de la chimie. " La chimie peut être propre et bio-inspirée, nous avons inversé la tendance ", résume Claude Grison.
Les industriels s'intéressent déjà à ces éco-catalyseurs, comme l'entreprise Chimex - une filiale du groupe L'Oréal - et le fabricant de cosmétiques japonais Takasago. " C'est un cercle vertueux : les efforts en écologie et en phytoextraction sont longs et coûteux, et si les industriels de la chimie n'étaient pas motivés par la valeur économique de ces plantes, nous n'aurions pas les fonds nécessaires pour mener de tels programmes de dépollution. C'est le principe de l'économie circulaire : la chimie donne les moyens à l'écologie d'avancer, et grâce aux efforts de l'écologie, nous pouvons innover en chimie ", conclut Claude Grison.
Et la phytoextraction pourrait avoir d'autres débouchés intéressants, comme la destruction de pesticides toxiques ou la synthèse d'insecticides naturels. Désormais à la tête d'un laboratoire mixte - 50 % de chimistes et 50 % d'écologues -, Claude Grison va continuer de décloisonner la science, une démarche qu'elle juge indispensable à la transition écologique. " La chimie et l'écologie ne sont pas opposées, au contraire.

"Les exploitations minières intensives et les activités industrielles métallurgiques sont à l'origine d'une forte pollution des sols, par des métaux lourds qui sont parmi les plus nocifs et ne sont pas biodégradables", explique la chimiste Claude Grison, professeur à l'université Montpellier-II, qui dirige le programme. Sur l'ancien gisement minier, d'où le vent et les pluies dispersent les poussières toxiques dans l'environnement, les cultures sont interdites. Deux enfants du voisinage sont atteints de saturnisme. Plus généralement, les polluants métalliques ont des effets délétères sur le système nerveux, les reins, les poumons et les tissus osseux.

D'où les espoirs suscités par les trois variétés de plantes "hyperaccumulatrices" de métaux lourds, dites aussi "métallophytes" : Noccaea caerulescens, Anthyllis vulneraria et Iberis intermedia. Celles-ci sont capables de piéger dans leurs feuilles des quantités phénoménales d'éléments métalliques, atteignant 7 % à 8 % de leur masse sèche. "Une folie végétale et chimique", commente la chercheuse.

Le programme développé est une approche des interactions intimes qui se sont développées entre une bactérie métallicolle, Mesorhizobium metallidurans, et les nodosités racinaires d'une plante hôte soumise à un fort stress métallique, Anthyllis vulneraria. et de noccaea caerulescens.

Le projet est le fruit de la collaboration de laboratoires de recherche publique, semi-publique et d'une société privée qui ont choisi de conjuguer leurs compétences en phytoextraction dans la réhabilitation écologique durable de sites miniers gardois et néo-calédoniens. Dans chaque cas, le programme de revégétalisation intègre le respect de la biodiversité locale. Les déchets végétaux et métalliques associés sont directement valorisés et transformés en catalyseurs verts. Ces derniers seront ensuite dispersés et stabilisés sur les déchets miniers divisés. Ces systèmes polymétalliques originaux servent de catalyseurs hétérogènes dans des transformations synthétiques permettant l'accès à des molécules à haute valeur ajoutée (molécules plates-formes aromatiques, hétérocycles et oligomères d'intérêt biologique, structures cycliques chirales, grands intermédiaires de la chimie industrielle …). La conception des procédés permet le recyclage par simple filtration; elle est également adaptée aux nouvelles contraintes réglementaires, économiques et constitue une solution concrète à la criticité des matières minérales non-renouvelables.

L'ensemble du programme scientifique est réalisé en association étroite avec les acteurs locaux, issus des collectivités et des structures étatiques. Il fait également l'objet d'actions de valorisation soutenues auprès de groupes industriels aux domaines d'applications complémentaires (Ecologie de la restauration, industries minière et chimique).

La chimie peut devenir moins polluante grâce à l'écologie, et la chimie offre des débouchés économiques à l'écologie. "

© CNRS - Claude Grison


Sites internet

https://www.google.fr/search?q=+Claude+Grison&ie=utf-8&oe=utf-8&gws_rd=cr&ei=lXPEVrmTEsz_aNHDsKAO

https://livingcircular.veolia.com/fr/heros/claude-grison-une-revolution-verte-dans-la-chimie


Vidéos

http://www.lemonde.fr/sciences/video/2015/02/04/chimie-la-revolution-de-l-ecocatalyse_4569478_1650684.html

https://www.youtube.com/watch?v=4iLNsDVknos

http://www.universcience.tv/video-des-plantes-pour-la-chimie-verte-7831.html



CNRS et Univ. Montpellier II, Montpellier

Dans le Gard, sur la commune de Saint Sébastien d'Aigrefeuille, se trouvent stockés les déchets d'une ancienne mine de plomb et de zinc qui, sous l'action des pluies, déversent de grandes quantités d'arsenic dans le Réigous, un ruisseau de la région. Marc Leblanc, chercheur au CNRS, analyse les eaux contaminées, essaie de comprendre les réactions chimiques complexes qui s'y produisent et recherche des solutions pour réduire ou supprimer cette pollution. Il met ainsi en évidence le rôle de bactéries aérobies qui catalysent les réactions de précipitation du fer et de l'arsenic et contribuent ainsi à limiter la pollution. Ces bactéries seraient une forme mutante de thiobacillus feroxidans.

En savoir plus : http://armspark.msem.univ-montp2.fr/carnoules/

https://www.canal-u.tv/video/science_en_cours/arsenic_et_bacteries.126

Générique
Auteur-réalisateur : RAULET Michel Auteur scientifique : LEBLANC Marc (Géofluides, Bassins, Eau, UMR CNRS et Univ. Montpellier II, Montpellier) Production : CNRS AV



Association Causses-Cévennes d'action citoyenne

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